Geosimulation
Désigne un ensemble de concepts, méthodes, et techniques, qui combinent les apports de l’intelligence artificielle et des sciences de l’information géographique, pour simuler la dynamique de systèmes spatiaux.
Ce terme est apparu il y a quelques années seulement (vers 2000). Il a émergé à peu près simultanément dans différentes équipes de géographie et de géomatique, avec quelques nuances quant au champ recouvert. Si l’étymologie renvoie de façon très générale à la simulation de ce qui est à la surface de la «terre», les utilisateurs de ce terme font référence à un champ plus précis dont le développement a été rendu possible par les progrès de l’informatique. La première spécificité est de développer le modèle utilisé au niveau des objets élémentaires, c’est à dire les objets qui peuvent être considérés comme des atomes relativement au phénomène étudié, et qui sont donc conceptuellement indivisibles. Ces objets ont des comportements, ils sont capables d’agir, et leurs actions, simultanées et le plus souvent interactives, produisent des structures spatio-temporelles qui font sens à un autre niveau d’observation. Il s’agit ainsi de formaliser, à l’aide de règles, les comportements de ces entités élémentaires et la méthodologie le plus souvent adoptée est celle des «systèmes» multi-agents. Les présupposés de cette technologie, issue de l’intelligence artificielle, mettent l’accent sur le rôle des «interactions» entre agents et sur l’émergence de structures durables à d’autres niveaux d’organisation. Ils insistent sur les mécanismes de mémorisation et d’apprentissage, ainsi que sur l’évolution des règles de comportement des agents. Ces propriétés ont influé sur la façon dont de nouveaux modèles ont été développés en sciences humaines et sociales et en particulier en géographie, mettant l’individu au coeur de la simulation et les mécanismes « bottom-up » à la base de la compréhension des structures spatiales.
Le domaine de la recherche urbaine est un de ceux où ces nouveaux modèles de simulation ont connu l’essor le plus spectaculaire (Benenson, Torrens, 2004). Les applications concernent des échelles spatiales et temporelles variées, depuis les mouvements de foule ou de trafic automobile où les trajectoires de chaque individu (piéton ou automobiliste) sont simulés à l’échelle fine de la rue et de la journée, jusqu’à la mobilité résidentielle où les choix des ménages sont appréhendés au niveau de la ville et à l’échelle de l’année ou de la décennie. La plupart des modèles correspondent à l’élaboration d’un monde artificiel dans lequel des agents aux comportements relativement simples circulent, interagissent, prennent des décisions en fonction de leurs caractéristiques propres, de leur «environnement», de leurs interactions avec les autres agents, et de leurs expériences passées. L’objectif est de tester des hypothèses relatives aux effets induits par différents types de comportements individuels sur des phénomènes observables à d’autres niveaux d’organisation géographique. D’un point de vue méthodologique les automates cellulaires sont souvent utilisés conjointement avec les systèmes multi-agents. Ils permettent de formaliser l’espace sous la forme d’une grille régulière de cellules, chacune d’entre elles étant caractérisée par un état, état évoluant en fonction des caractéristiques des cellules voisines suivant des règles de transition.
La plupart de ces modèles de geosimulation ont pour objectif de reproduire un fait spatial stylisé et utilisent un nombre d’agents relativement limité et des mécanismes d’interaction et d’évolution très simples. D’autres ont l’ambition de la validation empirique et sont amenés à traiter de collectifs d’individus nombreux. Dans les deux cas les progrès technologiques dans la gestion et la représentation de l’information géographique à des échelles fines (y compris en 3D applications dans le domaine de l’architecture et du design urbain notamment) jouent un rôle clé dans la formalisation des modèles.
voir aussi : modélisation