Complexité
Dans les sciences contemporaines, l’intérêt porté à la complexité provient de l’insuffisance de la démarche analytique classique à expliquer le réel. La complexité postule qu’il est impossible de décrire, sans réductionisme, certains phénomènes indécomposables et que le Tout n’est pas réductible à des unités élémentaires.
La notion de complexité est utilisée à deux niveaux différents: la complexité dans la constitution des choses: de la cellule à l’organisme et la complexité dans l’interprétation qui fait référence aux relations entre les composantes d’un système.
En Géographie existe une tension entre la nécessité pour produire des connaissances nouvelles de mettre de l’ordre dans les phénomènes, en risquant de fabriquer du simplifié et, de l’autre la dilution des schémas explicatifs en les intégrant dans des totalités imprécises. La démarche analytique disjonctive est fréquente en Géographie du fait de postures méthodologiques qui tendent à privilégier le plan à tiroirs, la classification et la fragmentation territoriale par rapport à l’explication et, à confondre délimitation spatiale de l’objet d’étude et définition dudit objet.
L’adoption du paradigme de la complexité implique une remise en cause de la causalité linéaire utilisée dans les schémas explicatifs traditionnels. A un enchaînement procédant d’une cause première, et s’appuyant à chaque maillon du raisonnement sur une monocausalité, on substitue à la fois une multicausalité et une démarche en boucle où l’effet rétroagit sur la cause. Dans un raisonnement en boucle, chaque composante est un maillon indispensable, un moment dans la production de la connaissance qui se génère elle-même, en même temps qu’elle génère l’explication générale.
La pensée de la complexité nécessite d’accorder autant d’importance à l’agencement des objets entre eux, aux interactions et aux types de liaisons entre ces objets qu’aux objets eux-mêmes. Elle suppose que dans un système existe une autonomie organisationnelle qui permette une reproduction et une transformation de ses constituants, c’est à dire une auto-organisation. Le principe de complexité permet d’interpréter en Géographie le fonctionnement des systèmes dynamiques tels que les villes, les «régions» ou les géosytèmes. L’intelligibilité du complexe se fait par la modélisation.
Dès lors, l’objectif des sciences sociales ne consiste plus à réduire le complexe au simple, mais à traduire le complexe en théorie.