Karst
Introduction
Le mot karst est le toponyme germanisé de Kras, une région de plateaux calcaires appartenant aux Alpes dinariques (Slovénie). L’ouvrage de Jovan Cvijic [Das Karstphänomen, 1893] a fait rentrer ce terme dans le vocabulaire scientifique. Il désigne désormais tous les modelés superficiels et souterrains issus de la dissolution par l’eau des roches carbonatées (calcaires et dolomies) dont les composantes principales sont, à l’image de la région éponyme :
– des surfaces rocheuses sculptées (lapiaz) ;
– des dépressions fermées (dolines et ouvalas, poljés) ;
– des vides souterrains (grottes et gouffres) ;
– des rivières subaériennes rares (remplacées par des rivières souterraines) ;
– des sources puissantes (émergences).
Les zones karstiques représentent environ 15 % des terres émergées ( figure 1). Elles se trouvent sous toutes les latitudes y compris les zones climatiques extrêmes (zones désertiques, tropicales et subpolaires sachant que leur répartition en Antarctique reste inconnue [Salomon & Pulina, 2005]) ; dans l’état actuel de nos connaissances, elles sont nettement plus abondantes dans l’hémisphère Nord. Elles se trouvent, aussi, à toutes les altitudes : karsts sous-marins, îles karstiques dont les atolls surélevés et karsts littoraux ; karsts des plaines, collines, plateaux [Jaillet, 2005] et montagnes [Vanara, 2000 a] dont la haute montagne [Maire, 1990] ;
Le speudokarst permet de classer toutes les formes qui ne relèvent pas du karst au sens strict. Il comprend :
– le thermokarst qui désigne les surfaces criblées de dépressions dues à la fonte de lentilles ou de culots de glace ;
– le parakarst qui comprend certains processus similaires à ceux du karst dans les roches évaporitiques (entonnoirs du gypse et sel gemme) et siliceuses (cuvettes et cannelures des quartzites et grès) ;
– l’hypokarst qui possède des vides souterrains dans les roches basaltiques (tunnels de lave) et dans l’eau à l’état solide (cavités des glaciers).
Dans le cadre de cet article, on s’en tiendra à la définition stricte du karst [Nicod, 1972 ; Collignon, 1988, Salomon, 2000 ; Gilli, 2011] que l’on peut subdiviser en exokarst et endokarst (figure 2).
1. L’exokarst
L’exokarst regroupe les morphologies de surface et l’épikarst.
La première propriété des roches carbonatées est la solubilité, à savoir leur mise en solution par de l’eau chargée en gaz carbonique. Elle est d’ordre chimique, intervient dans n’importe quel volume de calcaire (de l’échantillon au massif montagneux) et explique les évolutions superficielle et souterraine. La réaction réversible est la suivante :
CaCO3 + CO2 + H2O Ca (CO3H)2
La seconde propriété des roches carbonatées est la perméabilité de fissure. Elle est d’ordre géographique et n’intervient que pour les masses rocheuses importantes (massif montagneux). Dans l’épikarst, l’existence de discontinuités ouvertes sont autant d’opportunités pour l’eau d’agir sur quelques mètres de profondeur par élargissement progressif des vides par dissolution (épikarst).
En surface, le contact eau / roches carbonatées peut être direct et les formes s’aiguisent progressivement. Le contact peut, au contraire, être indirect ; l’intermédiaire est une couverture (humus, sol, altérites ou formations géologiques perméables) qui joue le rôle d’une compresse humide : les formes qui en résultent sont arrondies (crypto-karst). Dans l’épikarst, la roche est décomprimée sur une épaisseur de plusieurs mètres et forme un aquifère perché (aquifère épikarstique) permettant à la végétation de se développer. Les conduits horizontaux (grottes sous-cutanées) restent l’exception car le drainage est essentiellement vertical via les fractures les plus élargies par la dissolution.
1.1. Le lapiaz
Le nom lapiaz vient du latin lapis, pierre. Il s’agit d’un terme général désignant les formes de dissolution des affleurements rocheux carbonatés (figure 3) ; il mesure entre quelques millimètres et jusqu’à 45 m de hauteur. Les formes sont variées : cupules, cuvettes, rigoles, cannelures, perforations, lames, aiguilles, couloirs [Collignon, 1988, p. 31, figure 2.3]. Une partie de ces formes peuvent se retrouver imbriquées dans un ensemble appelé champ de lapiés.
Les méga-lapiaz regroupent les formes les plus grandes (5 à 45 m) :
– les reliefs ruiniformes dans les zones dolomitiques où la fraction sableuse est entraînée par le ruissellement et dégage les parties moins solubles (Montpellier-le-Vieux, Causse Noir, France).
– les forêts de pierre (shilin) de la Chine du Sud-Ouest (figure 4), les tsingy des massifs du Bemaraha et de l’Ankarana de Madagascar, les pinacles de la montagne de Gunong Mulu de Malaisie qui se développent toujours dans des calcaires très purs. Ils ont évolué sous couverture (crypto-lapiés aux formes douces) avant que l’érosion ne les mettent à nu et leur fassent acquérir des formes élancées (lapiés à cannelures verticales).
1.2. Les dolines et ouvalas
Les dolines (mot d’origine slovène) sont des dépressions fermées plus ou moins circulaires de taille variable. Le fond des dolines est souvent occupé par des altérites et/ou des sols plus ou moins épais. Leur densité est parfois telle qu’elles deviennent coalescentes : on les nomme alors ouvalas. Au fur et à mesure de son évolution, la doline se comble de matériaux détritiques qui sont entraînés dans le sous-sol. Les formes sont variées et, dans une même zone, plusieurs types peuvent se rencontrer :
– la doline en baquet aux rebords escarpés et fond plat. Sa version profonde est…
– la doline-puits par effondrement (vide sous-jacent préexistant) et parfois à fleur de nappe (cénote, Yucatan).
– la doline en entonnoir (figure 5) aux versants pentus qui peut évoluer, par remblaiement, vers …
– la doline en cuvette (figure 6), plus large que profonde, aux bordures à faible pente et fond plat [Nicod, 1972, p. 29].
Les dolines se forment par dissolution progressive de la roche sur leurs bords, dissolution favorisée par le fait qu’elles constituent un point privilégié d’absorption de l’eau ; les résidus insolubles s’accumulent et peuvent colmater le fond des dépressions qui s’inondent alors après la pluie, ce qui favorise leur élargissement (dolines en baquet, figure 5). Elles sont souvent alignées sur des accidents majeurs et leurs fonds peuvent être en relation avec des drains verticaux par lesquels les débris solides sont petit à petit soutirés, ce qui favorise leur approfondissement (dolines en entonnoir, figure 6). Certaines sont dissymétriques. Cette dissymétrie est à caractère structural (pendage incliné) ou climatique (présence d’un névé sous le vent). Les formes les plus grandes (> 100 m de profondeur) sont appelées méga-dolines (figure 7) ; elles sont, parfois, liées à l’effondrement d’une galerie ou salle souterraine, comme celle de Minyé (Papouasie – Nouvelle-Guinée.
1.3. Le poljé
Le poljé (terme d’origine slovène) désigne une vaste dépression à fond plat généralement large de quelques centaines de mètres et longue de plusieurs kilomètres (figure 8). L’érosion a généralement exploité une trame tectonique favorable : synclinal, graben, faille majeure, zone de broyage ou limite lithologique. Le fond est imperméabilisé du fait d’un colmatage par des alluvions. Les écoulements de surface disparaissent dans un gouffre appelé ponor. Lorsque le ponor se bouche (sédiments, débris végétaux, glace et/ou déchets anthropiques) ou que débit des eaux excède sa capacité d’absorption, il se forme un lac. L’ennoiement peut aussi provenir du débordement de l’aquifère vers lequel se dirigent normalement les eaux de surface ; les ponors devenues émissifs sont appelés estavelles [Salomon, 2000, p. 66, figure 17]. En fonction du climat et du contexte géologique, le lac peut être exceptionnel, annuel, pluriannuel ou permanent. Il favorise l’extension de la forme par corrosion latérale des calcaires.
1.4. Les vallées karstiques
Le canyon (terme d’origine espagnol) est une gorge étroite et profonde entaillée dans la masse calcaire (figure 9) par une rivière allogène provenant d’une zone imperméable. Il peut recouper des circulations souterraines et constituer le niveau de base de ces derniers mais il peut aussi être perché au-dessus de la nappe karstique qu’il alimente alors par ses pertes diffuses, d’où le risque d’un assèchement du lit, au moins en basses eaux [Vanara, 2000 b].
La reculée est une vallée qui naît d’un amphithéâtre calcaire au pied duquel jaillit une émergence. La vallée aveugle est parcourue par un cours d’eau qui, après un parcours aérien dans une gorges calcaire, se termine sur un cirque où il se perd en totalité. La vallée à éclipse présente successivement des écoulements de surface et souterrains (figure 10).
2. L’endokarst
L’endokarst représente la partie souterraine du système karstique. Elle est invisible depuis la surface mais l’exokarst et l’endokarst sont étroitement liés. L’endokarst contient la matrice carbonatée et ses vides dont certains sont accessibles à l’homme (figure 2).
L’ouverture des discontinuités est un préalable nécessaire à l’infiltration de l’eau ; elle s’effectue lors de la sédimentation (joints de strates) ou suite à des contraintes tectoniques (fractures). Quand l’eau, non saturée en CaCO3 pénètre le long des discontinuités, la dissolution peut se poursuivre en profondeur et créer des vides souterrains. La résistance mécanique des calcaires permet de conserver durablement ces vides. Enfin, l’existence d’un gradient hydraulique assure le renouvellement des eaux souterraines et l’évacuation des insolubles en sélectionnant les conduits les plus importants au détriment des plus étroits (hiérarchisation des réseaux de conduits). En effet, l’eau privilégie les fractures les plus ouvertes car les pertes de charge y sont moins importantes.
2.1. La spéléogenèse épigène
La zone vadose bénéficie des eaux de percolation de l’épikarst et/ou des ruissellements plus ou moins concentrées des zones imperméables proches. Elle constitue une zone de transit vertical des eaux. Les drains les plus larges sont les puits des spéléologues dont la succession constitue un gouffre. La circulation de l’eau y est rapide, ce qui permet, lors des précipitations, l’arrivée en profondeur d’eau non saturée. La zone noyée constitue la partie profonde du système dans laquelle tous les vides (porosité, fractures et drains) sont remplis d’eau. Elle constitue une zone de transit horizontal des eaux. Entre les deux précédentes, la zone épinoyée est la zone inondable [Audra, 2010 ; p. 44-45]. Les modèles récents [Häuselmann in Audra, 2010 ; p. 46-47] mettent en avant la prédominance de l’érosion en zone épinoyée. L’agrandissement des conduits s’y effectue, notamment, au cours du dénoyage, ce qui détermine la mise en place de conduits « en montagne russe » où tube (conduit noyé) et section à méandres (écoulement libre) se succèdent. Les émergences sont les points de débordement du système ; leur position est définie par la géométrie du massif (existence ou non de couches imperméables) et l’altitude du niveau de base hydrologique.
En régime vadose, l’eau n’occupe que la partie inférieure du conduit et le creusement s’effectue à ce niveau. La forme s’approfondit et donne des conduits plus hauts que larges appelée « méandres ». En régime noyée, l’eau remplissant le conduit, la corrosion s’effectue sur toute la section ce qui favorise l’acquisition d’une forme circulaire appelée conduit en tube. L’apport de sédiments peut modifier ce schéma classique. Le plancher du conduit est protégé et la corrosion latérale est favorisée (encoches latérales horizontales). En cas de colmatage complet, cette dernière peut même s’effectuer au toit du conduit (lapiés et chenaux de voûte). Le creusement est dit « paragénétique » [Renault, 1970].
Lorsque les vallées se creusent (soit parce que le niveau de la mer s’abaisse, soit parce que la tectonique ou l’isostasie induisent une surrection du massif), le point d’émergence migre vers le bas (sauf si l’aquifère est bloqué par un aquiclude). Le niveau de la zone noyée s’abaisse et un nouveau drain se met en place et l’ancien drain s’assèche (étage fossile). Les drains les plus larges sont les galeries des spéléologues dont la succession constitue une grotte (figure 11).
2.2. Les changements de paradigmes
Quatre modèles majeurs récents sont présentés. Ils permettent de renouveler l’analyse des processus à l’origine des cavités ou de certaines dynamiques et morphologies karstiques.
2.2.1. La karstification par fantômisation
La fantômisation est un processus qui s’exerce dans la zone saturée, qu’elle soit profonde ou superficielle. La première phase requière le temps long, c’est-à-dire une grande stabilité géodynamique. Elles demandent, en même temps, une source d’acidité renouvelée. Ces deux conditions sont permises, principalement, dans les zones de bombement lithosphérique modéré. Cette altération peut se produire aussi bien à partir de la surface que par des circulations profondes (boucles de convection bathyphréatiques), voire par des remontées hypogènes. Au sein du réservoir, la circulation lente de l’eau le long des discontinuités karstiques connectées augmente peu à peu la porosité de la roche par dissolution de la fraction la plus soluble tandis que la fraction minéralisée la moins soluble reste en place. Des pseudo-galeries se forment, dans lesquelles le volume, entre les parois saines, est occupé par une altérite résiduelle de la roche originelle (figure 12).
Après ce temps long de préparation, la seconde phase est du domaine du temps court. Elle traduit une déstabilisation paléo-environnementale générant un enfoncement du niveau de base par mouvements glacio-eustatiques, surrections et même perturbations anthropiques (carrières à ciel ouvert). L’accélération des circulations d’eau permet l’évacuation des altérites. Le débourrage des couloirs altérés révèle un réseau labyrinthique en trois dimensions où certaines galeries conservent des altérites encore en place. La continuité d’indices, tels que des bancs de chailles – au même niveau dans la roche encore saine et l’altérite – permettent de différencier ces dernières des remplissages des karsts épigènes [Quinif, 2010].
2.2.2. Les cavités hypogènes
Dans ce cas, le creusement est initié par une circulation de fluide per ascensum. Les eaux sont aussi d’origine météoriques mais elles ont circulé à grande profondeur et se sont minéralisés (sulfures, sulfates ou dioxyde de carbone dissous). Lors de leur remontée, les flux ascendants rencontrent, au niveau des émergences, les aquifères sus-jacents dont les eaux sont d’origine météorique (cf. 2.1). Les interactions chimiques renforcent l’agressivité de ces eaux aux origines différentes (encoches latérales), les dégazages favorisent la corrosion des parois (coupoles de dissolution, fins lapiés de paroi). Outre leur morphologie labyrinthique (cavité dite « sans queue ni tête »), la mise en évidence de minéralisations particulières (gypse de néoformation) permet de conforter le diagnostic (figure 13). Auparavant limité à quelques cas (Lechuguilla, Carlsbad cavern, Nouveau Mexique, États-Unis), 10 à15 % des cavités de la Planète seraient, partiellement ou totalement, d’origine hypogène [De Waele et al., 2024].
2.2.3. Les variations extrêmes du niveau de base, l’exemple des karsts méditerranéens
La crise de salinité est un épisode géologique qui correspond à l’assèchement progressif de la mer Méditerranée durant le Messinien (fin du Miocène) suite à la fermeture du détroit de Gilbratar. Le rééquilibrage eustatique avec l’océan Atlantique n’étant plus possible Elle conduit à une baisse du niveau marin de l’ordre de 1 500 m et aux dépôts massifs d’évaporites dans le fond de la dépression asséchée définitivement vers 5,53 Ma. Les fleuves tributaires (Rhône, Pô, Nil) et leurs affluents creusèrent des vallées profondes. Les réseaux karstiques se raccordent aux différents niveaux de base : mer, fleuves et rivières [Mocochain et al., 2006].La remise en eau de la mer Méditerranée se fait au Zancléen (début du Pliocène) de manière brutale : rupture du seuil situé au niveau du détroit de Gilbratar. La mer envahit les vallées formant de longues rias peu à peu comblées de sédiments qui colmatent les vides karstiques. Les réseaux réagissent par un étagement per ascensum des niveaux de grottes reliés par des puits-cheminées et mise en place de captures karstiques horizontales (figure 14).
2.2.4. Les interactions roche-vivant
Le vivant a longtemps été considéré comme un opportuniste qui venait occuper les vides créés par les interactions entre la roche et les fluides. Néanmoins, depuis quelques années les impacts biogéniques ainsi que les évolutions qui en découlent sont mises en évidence.
La première approche concerne les prémices : des micro-organismes peuvent intervenir dans la formation des karsts. Ainsi, le rôle des bactéries est évoqué dans les processus de fantômisation ; elles sont aussi à l’origine des gaz qui permettent la formation des karsts hypogènes.
La seconde approche concerne les évolutions tardives : les galeries dites « fossiles » servent d’abri à une certaine faune. Parmi eux, le plus emblématique est la chauve-souris. L’impact de la présence de colonies de chiroptères sur la morphologie des cavités a été démontrée dans les milieux tropicaux où les populations sont aujourd’hui encore importantes [Lundberg & MacFarlane, 2008]. Mais on étend maintenant cet impact dans toutes les zones géographiques propices climatiquement aux chauves-souris même si, du fait de la pression humaine, les populations y sont devenues résiduelles [Audra et al., 2016]. La corrosion est directe : la respiration des animaux, provoque l’élévation locale des températures, de l’humidité et de la concentration en CO2. Elle est aussi indirecte : la minéralisation du guano engendre percolations et gaz ultra-acides. La crypto-corrosion sous guano façonne des tines, fosses et lapiaz à guano aboutissant à un abaissement du sol rocheux. La corrosion de condensation biologique sculpte les parois, plafonds et concrétions de niches, cloches et coupoles. Entre ces formes, les parois sont rabotées. Les minéraux associés sont des phosphates (notamment l’hydroxylapatite), des sulfates (principalement le gypse) et des nitrates (surtout de potassium : le salpêtre). Selon le nombre d’individus et la durée de l’occupation, les impacts – regroupés sous le terme de biocorrosion – vont des formes localisées à un remodelage des galeries, leur expansion pouvant atteindre deux fois le volume initial (figure 15).
Conclusion
Le karst bénéficie d’études dynamiques, en constant renouveau et qui se nourrissent d’une approche fondamentale : le terrain. Les pionniers ont privilégié la surface mais, très rapidement, les chercheurs ont compris qu’il fallait y intégrer l’étude du milieu souterrain, étude qui a été facilitée par la mise au point des techniques de progression alpine (sur corde) dans les années 1970. Progressivement, les modèles simples se sont complexifiés et les observations réalisées ont permis de mettre en évidence de nouveaux concepts. Depuis quelques années des paradigmes révolutionnaires sont apparus : la fantômisation, la karstification hypogène, les variations extrêmes du niveau de base et la biocorrosion [Dandurand et al., 2022]. Ce sont des outils conceptuels qui permettent d’affiner l’analyse des paysages exo- et endokarstiques.
La discipline, en plein développement, se renouvelle par des approches croisées. Si les géographes ont su maintenir une place privilégiée dans la compréhension du karst, c’est qu’ils ont toujours travaillé en collaboration étroites avec des spécialistes d’autres disciplines telles que la spéléologie, la géologie, l’hydrologie, le génie civil, la climatologie, la paléontologie et l’archéologie.
Nathalie VANARA et Jean-Yves BIGOT
Légende des illustrations
-Figure 1 – Carte de la répartition mondiale des affleurements de roches carbonatées (calcaires et dolomies). Leur répartition en Antarctique reste inconnue (source : https://fr.wikipedia.org/wiki/Karst#/media/Fichier:Carbonate-outcrops_world.jpg).
-Figure 2 – Bloc diagramme schématique du canyon de la Jonte à l’aval du Truel. Exokarst et endokarst sont étroitement liés (Cévennes, revue du parc national des Cévennes n° 23-24, figure modifiée).
-Figure 3 – Lapiaz en table (massif des Arbailles, France, cliché : N. Vanara). Les discontinuités de la roche sont élargies par dissolution ; elles sont comblées par des altérites (restes d’anciennes couvertures). La mousse joue le rôle de compresse humide, d’où le maintien des formes douces de la roche.
-Figure 4 – Forêt de pierre du parc national de Shilin, Yunnan, Chine du Sud-Ouest (cliché : R. Maire). Le pinacle (calcaire permien à faible pendage) atteint une vingtaine de mètres de hauteur. Une encoche sépare la partie haute à cannelures verticales (dissolution par les eaux de pluie) de la partie basse aux formes douces (crypto-karst : exhumation récente de la couverture d’altérites).
-Figure 5 – Doline en baquet (Causse Méjean, Mas-Saint-Chély, Lozère, France, cliché : J.-Y. Bigot). La dépression fermée s’agrandit par dissolution ; son fond – colmaté de matériau détritique imperméable (terra rosa) – favorise son extension latérale.
-Figure 6 – Doline en entonnoir, plateau de Lescaumère, Bielle, Pyrénées occidentales, France (cliché : J.-Y. Bigot). La dépression fermée s’agrandit par soutirage. Le départ des matériaux dans l’endokarst favorise son approfondissement.
-Figure 7 – Méga-doline près de Al Malek, Lattaquié, Syrie (cliché : J.-Y. Bigot).
-Figure 8 – Poljé de Ljubinjé (Bosnie), la partie basse est inondée (cliché : J.-Y. Bigot).
-Figure 9 – Canyon de la Jonte (Grands Causses, France, cliché : J.-Y. Bigot). Elle prend sa source dans les Cévennes avant de traverser par de profondes gorges les causses Méjean et Noir. En basses eaux, une partie de son cours est à sec. Les pertes alimentent une rivière souterraine connue, en partie, par les explorations spéléologiques.
-Figure 10 – Coupe synthétique de la vallée à éclipse de la Wutuhe (Panxian, Guizhou, Chine, figure R. Maire, modifiée).
-Figure 11 – Réseau étagé. L’enfoncement de la vallée (chute du niveau de base) génère la formation d’un nouveau drain, sous le drain existant. L’ancien drain et l’ancienne émergence sont abandonnés (étage « fossile »). L’ancien drain, désormais situé dans la zone vadose, est recoupé par des puits qui se raccordent au drain actif [Audra, 2010, p. 45, figure 4].
-Figure 12 – Tranchée de la déviation de Figeac (Fumat, Capdenac, Lot, France). Les calcaires du Lias (Sinémurien) présentent des zones d’altération de type fantôme de roche le long de fractures verticales (cliché J.-Y. Bigot).
-Figure 13 – Synthèse schématique des types de cavités hypogènes [Audra, 2010, p. 59, figure 1].
-Figure 14 – Modèle de spéléogenèse associé au cycle eustatique messino-pliocène (coll. P. Audra).
-Figure 15 – Biocorrosion. Synthèse des principales morphologies et distribution de l’activité des processus avec principalement : 1/de la corrosion de condensation sur les voûtes, 2/ de l’eau de condensation et des coulées d’urine sur les parois, 3/ de la crypto-corrosion sous guano au plancher.