Région

Dans le sens commun une région est une portion de l’espace terrestre qu’un critère particulier permet d’individualiser, en la détachant de son environnement (régions de montagne, région de plaine, région polaire, région urbaine, région méditerranéenne, etc. .).

La notion de région a occupé une place originale dans la conception des savoirs géographiques. Construction forte dans la géographie française de la première moitié du XXe siècle, la notion de région devenue plus polysémique, a perdu par la suite de sa position scientifique hégémonique, tout en trouvant sur le terrain de l’action politico-administrative dans les pays industriels une assise qui va se consolidant.

En illustrant la notion de région géographique (Vidal de la Blache 1903, 1913 et Gallois 1908), l’Ecole française de géographie s’est attachée à donner un contenu savant à cette notion. Pour celle-ci, la région est une portion de l’espace terrestre, dont l’individualisation tient à la très étroite combinaison des caractéristiques physiques, de celles l’histoire, et des activités des sociétés qui l’occupent. Dans une région géographique donnée, les sociétés ont su développer un genre de vie qui, prenant appui sur un complexe de techniques, de pratiques et d’attitudes, ont acquis une maîtrise originale du milieu physique. Ainsi conçue, la région géographique constitue le cadre de la plupart des études de géographie pendant près d’un demi siècle, et en particulier celui de la quasi totalité des thèses d’état.

L’intrusion, dans les années 1960 et 70 des notions d’espace et d’organisation de l’espace, l’ouverture aux problèmes d’«aménagement» ont, à la fois, décentré la notion de région, les caractéristiques du milieu physique n’y ont plus occupé une position de premier plan, et donné à celle-ci une position beaucoup moins hégémonique dans la construction des savoirs géographiques. La région est le plus communément conçue comme un sous espace fortement intégré, identifiable à l’échelon intra étatique. Cette intégration peut se manifester par une forte «homogénéité» intra régionale. La région est dite région homogène si ses unités spatiales constitutives se ressemblent plus entre elles qu’elles ne ressemblent à d’autres unités extérieures à la région. Plus communément encore, l’intégration est appréciée en considérant les relations entre les unités spatiales constitutives du sous-ensemble. Le niveau d’intégration de ce dernier est d’autant plus élevé que ces relations apparaissent systématiquement plus intenses à l’intérieur de la région qu’en direction d’unités spatiales extérieures. Dans cette logique, le rôle relativement dominant des grands centres urbains dans la structuration des relations intra régionales a promu la notion de région polarisée (Juillard 1962). L’organisation des espaces régionaux par les réseaux urbains a été placée au cœur des études régionales

Dans le même temps, sous les effets conjugués – de la contraction espace temps qui a accéléré la réflexion sur les maillages territoriaux associés aux différents niveaux de l’organisation politico administrative des Etats – des tensions apparues quand ces derniers s’appuyaient sur des formes trop centralisées du pouvoir politique et enfin – des astreintes d’une réflexion planification territoriale qui intègre les différents niveaux de l’organisation de l’espace, ont imposé ou renforcé le niveau régional comme niveau de représentation, d’administration et d’action: Etats dans les structures étatiques fédérales ou Régions dans les autres. La régionalisation est à la fois l’opération qui consiste à institutionnaliser des Régions et à individualiser à cet échelon les modalités de conception et/ou de mise en œuvre de politiques sectorielles qui peuvent être globalement définies à d’autres échelons géographiques de niveau supérieur. La Région a désormais son territoire, comme l’Etat a le sien.

La réflexion sur les «représentations» de l’espace qui s’est développée dans le sillage de l’approche « phénoménologique » selon laquelle notre perception de la réalité est le produit d’une reconstruction mentale ne pouvait qu’envahir le champ de la réflexion régionale. La région n’existe qu’en fonction du sujet percevant qu’en fonction de l’objet perçu. Les idées de sentiment d’appartenance et d’appropriation mentale précipitent « la région, espace vécu » (Frémont, 1976) vers le territoire, terme devenu, beaucoup plus rapidement encore, une notion tout aussi polysémique que celle de région.

Autres conceptions de la région