Région-naturelle

A mesure que la géographie se détache de l’histoire et à mesure qu’elle cesse d’être descriptive, elle doit donc adopter les divisions qui se prêteront le mieux au classement et à l’interprétation des faits, c’est à dire les emprunter à la nature elle-même.
[…] c’est pour des raisons plus hautes, touchant à la conception même de la géographie, qu’il faut s’en tenir aux conditions physiques. Rechercher dans la variété, dans la complexité des faits où intervient l’activité de l’homme ceux où se marque l’influence du milieu, c’est la propre tâche de toute la partie de la géographie qui n’étudie pas simplement les phénomènes naturels et qu’on s’accorde aujourd’hui à appeler la géographie humaine […] il faut, lorsqu’on veut rendre compte des faits humains, penser toujours à l’influence du milieu. Or comment reconnaître cette influence sans une étude préalable, indépendante, du milieu physique?
[…] C’est à ces unités, grandes ou petites, qu’il convient de réserver le nom de « région naturelle ». J’ai dit d’ordre physique. Je crois en effet que c’est dans la nature qu’il faut chercher le principe de toute division géographique. On objectera que, dans nos pays de vieille civilisation, ce n’est plus la véritable nature que nous avons sous les yeux, mais une nature modifiée, transformée par le travail des générations humaines.
Lucien Gallois : Régions naturelles et noms de pays, 1908