Ecologie du paysage
L’écologie du paysage est une approche qui vise à étudier les processus biotiques et abiotiques et leurs relations aux structures des paysages. Cette approche peut être décrite autour de deux piliers, un premier scientifique caractérisé par des pratiques issues de théories en biologie et en géographie et un second pilier s’inscrivant davantage dans une perspective aménagiste et de protection de l’environnement.
L’écologie du paysage est une traduction provenant de landschaftsökologie (Landscape Ecology en anglais) dont on attribue souvent la naissance à C. Troll en 1939. Ce courant trouve différentes racines dans la géographie naturaliste du début du XIXème siècle qui avait des proximités importantes avec les sciences naturelles. Ainsi, suite à la définition clé du concept d’écosystème en 1935, l’écologie du paysage se donne pour objectif de donner une base spatiale aux approches en environnement.
Dans les années 1970, l’écologie du paysage va suivre les évolutions scientifiques qui se portent sur la généralisation des méthodes quantitatives et systémiques, à l’image des travaux sur les géosystèmes. Elle va alors se couper de certains travaux sur le paysage, en s’écartant des avancées sur le paysage culturel notamment menées au sein de la géographie par C. Sauer. Puis suite à ce tournant, la théorie de la perturbation va renouveler les approches environnementales.En effet, en inscrivant les perturbations au centre les dynamiques biophysiques, elle va remettre en cause l’idée centrale d’un équilibre à atteindre dans la nature. Par exemple, le feu auparavant vu comme extérieur aux systèmes, passe du statut d’anomalie à un statut de variable structurante pour comprendre les changements environnementaux. De ce fait, ce renouvellement participe à davantage inscrire l’action humaine dans les systèmes étudiés. Les recherches se portent alors sur l’analyse des processus biophysiques dans les structures du paysage avec un vocabulaire commun mettant en avant les concepts clés de ce courant (tache, matrice, corridor,…). Les études mettent alors en évidence des relations entre les espèces (présence/absence, abondance,…) et les structures spatiales environnantes (bocage, degré d’urbanisation,…).
L’écologie du paysage émerge véritablement au milieu des années 1980 avec notamment la naissance d’une revue (Landscape Ecology en 1987) et d’une association (IALE : International Association for Landscape Ecology). La diffusion d’indicateurs spatiaux quantitatifs va donner une
dimension importante à cette approche au point même de la faire
reconnaître par certains comme une discipline à part entière. Aujourd’hui l’écologie du paysage est essentiellement reconnue comme une approche environnementale prenant pour objets tous types d’espaces (urbain, rural,…). C’est cette approche sur laquelle les politiques publiques (en France notamment) se sont beaucoup appuyées pour protéger la biodiversité ordinaire à travers les dispositifs de trames vertes et bleues qui font clairement échos aux corridors écologiques et au vocabulaire commun de l’écologie du paysage.
Si l’écologie du paysage a produit des outils d’analyse pertinents et complémentaires de ceux crées en analyse spatiale (métriques de connectivité, de diversité,…), elle est parfois critiquée en géographie à deux principaux égards (Foltete, 2008), (Bertrand, 2014). D’une part, son tournant spatial s’est fait principalement sur l’impulsion de recherche en biologie et a donc parfois délaissé les processus abiotiques, ceci se traduisant par une approche des paysages « à plat » qui n’intègre pas véritablement les effets de formes, reliefs… D’autre part, en entrant dans les politiques publiques, elle s’est orientée dans une perspective d’aménagement sans intégrer d’autres courants prenant davantage en compte les dynamiques sociales. Ainsi, les études actuelles en écologie du paysage font souvent abstraction des représentations et des effets de pouvoirs, paramètres pourtant centraux pour comprendre l’évolution et la gestion des paysages.
voir aussi: biosphère
Sébastien Caillault